« La Montagne, ça vous gagne ». C’est par ce slogan de 1990 que les stations de ski ont lancé la tendance des vacances aux sports d’hiver. Depuis, l’attachement des français pour les séjours à la montagne n’a jamais faibli. Été comme hiver, les stations trouvent leur public avide d’air pur, de sensations et de grands espaces.

Mais l’avenir du tourisme de montagne n’est pas une longue piste tranquille. Entre enjeux climatiques et révolution numérique, le secteur doit étudier de nouvelles trajectoires pour rester sur le podium des destinations populaires. Quelle est donc la place du tourisme de montagne en France en 2018 ? Et comment doit-il s’adapter et renouveler son offre de services face aux évolutions en cours ?

Illustration montagne

Panorama du tourisme de montagne en France en 2018

Une fréquentation en pente douce

Occupant 23% du territoire, la montagne française pèse sur la géographie touristique nationale ! En effet, elle représente le premier domaine skiable d’Europe réparti sur 6 massifs montagneux. Des spots appréciés par les touristes français (74%) mais aussi européens (24%)(1).

Une destination pour les familles et les groupes

Forfaits enfants, activités « après-ski », mini-pistes, écoles de ski, halte-garderie, hôtels-clubs, stations « Famille Plus »… La montagne fait le bonheur des familles avec enfants.

Des stations comme les Menuires, les Karellis ou Orcières Merlette 1850 ont développé leurs infrastructures autour du concept « kids friendly ».

Friendly Menuires capture site web

En 2018, plus d’un séjour sur 2 a été effectué par des familles avec enfants et 28% par des couples seuls (2).

Les groupes d’amis, jeunes ou seniors, aiment également se réunir à la montagne. Ainsi, les logements sont occupés par 4,9 personnes en moyenne !

La montagne peine, en revanche, à séduire les personnes seules. Elles sont seulement 10% (2) à avoir pris le chemin des sommets en 2017. Un chiffre en baisse comme celui de l’intérêt des jeunes (3) (15-25 ans) qui délaissent la destination au profit de city-trip.

Les enjeux du tourisme de montagne

Le climat en question

  • La menace du réchauffement climatique

Le tourisme de montagne s’articule autour de pics de fréquentation liés au calendrier scolaire et aux conditions météorologiques. Mais les nouvelles ne sont pas fameuses ! Les sommets des Alpes souffrent d’un réchauffement 3 fois supérieur à la moyenne mondiale. Selon un rapport de l’OCDE (3), les changements climatiques menacent dangereusement le secteur des sports d’hiver en Europe.

Assiste-t-on alors à la chute programmée des activités de glisse ? Ski alpin, promenade en raquettes, snowboard, luge, ski de fond, randonnée en chiens de traineaux vont-ils survivre au taux d’enneigement aléatoire ? Sans aucun doute au sein des stations de haute altitude.

Néanmoins, les chutes de neige insuffisantes des précédentes saisons ont fragilisé les stations de basse et moyenne altitude. Certaines d’entre elles seraient vouées à disparaître dans les 30 prochaines années.

  • La solution contre la canicule

Une chose sûre, la montagne a tout à gagner en période estivale. L’été 2018 a laissé présager l’apparition d’un tourisme de « fraîcheur » en quête de bols d’air frais. À condition de repenser l’attractivité des stations autour d’une image plus festive et conviviale. Le défi consiste à installer la montagne comme une vraie alternative au tourisme balnéaire.

Un pôle d’excellence dédié à la montagne en été a d’ailleurs été créé par le MEAE, conscient du potentiel et des enjeux économiques du secteur. Il a donné lieu à la proposition de 22 mesures pour accueillir plus de touristes entre juin et septembre dans les destinations de montagne.

La réduction de l’impact environnemental

Au-delà de la couverture neigeuse, c’est l’impact environnemental des stations qui est en jeu. La neige artificielle ou de culture, les aérateurs, les canons existent. Certes ! Mais quid de l’environnement ? Parce que la montagne est LA destination nature par excellence, elle se doit d’être écologique.

Les touristes à la recherche d’une authenticité y sont de plus en plus sensibles.

  • Des stations écoresponsables

La transformation de station de ski en domaines écoresponsables est un enjeu majeur. En Finlande, la station Pyhätunturi a ouvert la voie à un tourisme de montagne propre : réduction de la consommation de carburant des équipements, chauffage par biomasse, installation de clôtures à neige, etc. Elle est aujourd’hui la seule station présentant zéro empreinte carbone dans le pays.

Pyhatunturi_Environmental

En France, les sites de montagne ont axé leurs efforts sur l’utilisation de l’eau, l’amélioration de la fixation du manteau neigeux, la lutte contre le gaspillage, la protection des forêts, la suppression du plastique ou sur la production d’énergie verte. Autant de démarches encouragées par l’association Mountain Riders qui sensibilise depuis 2001 à la préservation de la montagne.

C’est ainsi que le label Flocon Vert valorise les destinations exemplaires. Comme la station des Rousses dans le Jura, véritable fer de lance de cette nouvelle génération.

Label Flocon Vert _ LKes Rousses

  • Des transports maîtrisés

La pollution en montagne résulte surtout des déplacements routiers. Alors que de nombreuses stations sont accessibles par le train, la voiture reste le mode de transport privilégié par 85%(2) des visiteurs. Heureusement, la mise en place de navettes et le covoiturage allègent les flux de transports internes et pendulaires. Les accès aux stations restent cependant à aménager afin de limiter l’engorgement et la pollution automobile.

La diversification de l’offre de loisirs

Le vacancier en a fini avec le « Tout ski ». Il est désormais à la recherche d’un tourisme de séjour multi-activités et multi-saisons. Un besoin qui s’accorde parfaitement avec la nécessité de diversification des stations de moyenne et basse altitude.

Accrobranche, fat bike, complexe aqua-ludique, circuit de pumptrack, bowling, sentiers de randonnées, tous les moyens sont bons pour vivre « l’expérience montagne ».

Grâce à cette stratégie, la station des Saisies a vu sa fréquentation bondir de 25% en été.

Les Saisies_Site web

L’idée est de se différencier et de proposer des activités originales, voire inédites. Mais aussi d’attirer les non sportifs avec des packages « Hors-ski » qui allient plaisir et bien-être (spa, shopping, gastronomie, patrimoine, etc.) et des solutions de déplacements à moindre effort (vélos électriques, remontés mécaniques pour piétons).

Le renouvellement de l’image

La montagne et les sports d’hiver véhiculent bon nombre de clichés : destination chère, nourriture grasse, logements minuscules, soirées ennuyeuses, embouteillages interminables, etc.

L’enjeu consiste à redynamiser et à adapter la destination aux tendances de consommation touristique. Comment ? Par l’écotourisme, le glamping, le slow tourisme, des pistes connectées, des lieux instagramables, des offres flexibles, des hébergements abordables…

« Déringardiser » le tourisme de montagne est un élément indispensable pour anticiper le renouvellement de la clientèle. Surtout chez les 18-25 ans (3), pour qui la montagne n’apparaît pas dans leurs centres d’intérêts.

La station de montagne du futur

Réduire la montagne au sport ou à la neige correspondrait à se couper d’une nouvelle clientèle. Au contraire, les stations doivent s’adresser à tous les publics pour étaler la saison touristique sur l’année.

La montagne comme destination de vacances ludique et plurielle

Il s’agit de penser la montagne comme un pôle touristique global hyper connecté au même titre que le littoral. Outre la diversification de l’offre avec des activités « tout public » et « multi-saisons », la montagne doit proposer des événements.

Des manifestations émergent déjà. Tomorrowland Winter pose ses enceintes à l’Alpe d’Huez dès mars 2019. Un festival de musique électronique qui réunit 30 000 festivaliers pendant 3 jours entiers. La féria aussi prend de l’altitude avec du snow rugby, de la pétanque sur neige, du taureau mécanique aux Sybelles. Autant d’initiatives à multiplier pour créer des rendez-vous incontournables.

La clientèle est aussi en attente d’une variété d’enseignes de shopping et de restauration.

Cette nouvelle offre de commerces et d’activités devra cependant relever un défi majeur : s’intégrer dans le paysage dans un contexte responsable et durable.

Une identité forte à construire

Pour un vacancier lambda, il est impossible aujourd’hui de différencier un massif ou un domaine skiable plutôt qu’un autre. C’est pourquoi le prix et l’hébergement(2) arrivent en tête des critères de choix d’une station !

L’enjeu consiste alors à créer une identité forte autour de campagnes de communication  impactantes. Construire l’image comme une marque et la diffuser auprès du grand public. Comme Savoie-Mont Blanc qui utilise une stratégie digitale avec une forte présence sur les réseaux sociaux.

L’innovation au cœur du développement

Le département de l’Isère a initié un tournant déterminant avec une réflexion autour de la station en 2030.

Selon Chantal Carlioz, présidente d’Isère tourisme, la station de ski du futur sera « multiforme parce que le modèle à imaginer doit être créatif, innovant. C’est en cela que l’Isère a toutes ses chances, parce que son ADN, c’est l’innovation ».

Alpes IsHere

Se dessinent en Isère des projets de positionnement pilotes autour de thématiques comme les stations « énergie », « high tech », « loisirs », « hyper sport » ou encore « douce ». 130 actions axées sur 9 points centraux (cadre de vie, hébergement, environnement naturel…) ont été décidées.

De nombreux autres acteurs planchent sur la montagne du futur. Cluster Montagne organise chaque année un concours « Montagne innovante et internationale » qui accompagne les projets en lien avec les besoins de la montagne. Parallèlement, les « Digital Montagne Awards» récompensent les initiatives dédiées à l’innovation digitale des territoires de montagne.

Val Thorens est l’une des premières stations à avoir misé sur l’innovation connectée dès 2010. Et ça marche puisqu’elle a été élue à plusieurs reprises « Meilleure station de ski du monde » ! La recette du succès : wifi gratuit sur les pistes, fancams, informations en temps réel, propositions d’activités personnalisées, wifi de poche, etc.


Sources : (1) Indicateurs et analyses 2018 – Domaines Skiables de France / (2) Enquête de l’ANMSM, étude ConsoMontagne – Août 2018 / (3) Baromètre Ipsos-mmv 2018

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